faire long feu

Définition, traduction, prononciation, anagramme et synonyme sur le dictionnaire libre Wiktionnaire.

Français[modifier le wikicode]

Étymologie[modifier le wikicode]

Au temps des armes sans douilles à amorces, faire long feu signifiait que lorsque l’on mettait le feu à la poudre d’un mousquet (ou d’un canon) après avoir délicatement chargé l’arme, la poudre se consumait en fusant au lieu d’exploser. Faire long feu caractérisait l’échec : le coup ne partait pas.

Locution verbale [modifier le wikicode]

faire long feu \fɛʁ lɔ̃ fø\ (se conjugue → voir la conjugaison de faire)

  1. Ne pas partir, en parlant d’une arme à feu.
    • « Ah çà ! il paraît, dit le Pédant, que les arquebuses de ces messieurs ont fait long feu à cause de l’humidité de la nuit. — (Théophile Gautier, Le capitaine Fracasse, 1863)
    • — Quant à continuer, je n’en suis pas, messieurs, dit Fontrailles ; M. de Cinq-Mars en a agi trop noblement avec moi : mon pistolet avait fait long feu, et, ma foi, le sien s’est appuyé sur ma joue, j’en sens encore le froid ; il a eu la bonté de l’ôter et de tirer en l’air ; je ne l’oublierai jamais, et je suis à lui à la vie et à la mort. — (Alfred de Vigny, Cinq-Mars, Michel Lévy frères, 1863)
  2. (Sens figuré) Manquer son but ; ne pas produire l'effet attendu.
    • … Ma jeunesse s’éteint, ma mère est éveillée !
      Elle apparaît comme un spectre dans la cabine, — elle était dans celle du fond, nous sommes dans celle du devant, — elle vient droit à nous, et va commencer une scène.
      Mais bah ! le tapage couvre sa voix. — Les garçons vont et viennent, le cuisinier passe avec ses plats, les sous-officiers rôdent avec des bouteilles sur le cœur ; il y a une farce qui part, une chanson qui éclate, un vacarme, un tohu-bohu ! Sa fureur fait long feu.
      « Seule de femme, » elle est d’avance sûre d’être vaincue.
      — (Jules Vallès, L’Enfant, G. Charpentier, 1889)
    • Il a appris à ses dépens que la poudre fait long feu, et qu’il ne suffit pas de placer les gens en face d’un beau paysage ou d’un beau livre pour les leur faire goûter. — (Marguerite Yourcenar, Archives du Nord, Gallimard, 1977, page 255)
    • Les pompidoliens soutiennent d'abord l'éphémère candidature du Premier ministre, Pierre Messmer, qui expédie les affaires courantes. Mais ce contre-feu fait long feu. Messmer renonce. Les pompidoliens vont alors favoriser l'homme qui a fait tomber le général en 1969, l'antéchrist du gaullisme : Valéry Giscard d'Estaing. — (Michel Taubmann, Le fils perdu de la République, Éditions du Moment, 2015, chapitre 6)
  3. (Sens figuré) Durer longtemps, plus que prévu.
    • La querelle fit long feu, le bruit en alla jusqu’à la Cour, et l’Empereur voulut savoir l’affaire. — (Marcel Aymé, La jument verte, Gallimard, 1933, réédition Le Livre de Poche, page 8)
    • Écrire un récit de voyage au XIXe siècle, une époque où le genre semble avoir fait long feu, n’a rien d’évident. — (Marion Rousset, En 1840, Étienne Cabet rêvait un paradis rouge, Le Monde. Mis en ligne le 25 août 2017)

Notes[modifier le wikicode]

L’erreur commune, dans l'usage actuel, est de considérer que ne pas faire long feu est la négation de faire long feu (énantiosémie). Il s’agit d’une expression différente, qui ne tire pas son origine du fonctionnement des armes à feu, mais fait référence au feu en général. Elle signifie « ne pas durer longtemps ». Néanmoins, la plupart des lexicographes considèrent que l'expression ne pas faire long feu est issue d'un mésusage de faire long feu, qui a certainement pour origine le paradoxe sémantique de l'emploi de l'adjectif long pour faire référence à un événement de courte durée[1].

Traductions[modifier le wikicode]

Prononciation[modifier le wikicode]

Voir aussi[modifier le wikicode]

Explication de Bernard Cerquiglini en images

Références[modifier le wikicode]

  1. Martine Rousseau, Olivier Houdart, faire ou ne pas faire long feu ?, Le Monde. Mis en ligne le 31 octobre 2012