Canadien français

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Français[modifier le wikicode]

Étymologie[modifier le wikicode]

« Ce n’est que très graduellement que l’ethnonyme “canadien français” apparaît au cours des années 1840[1]. » On disait précédemment Canadien tout court pour désigner les habitants francophones du Canada. Locution  composée de Canadien et de français.

Locution nominale [modifier le wikicode]

Singulier Pluriel
Canadien français Canadiens français
\ka.na.djɛ̃ fʁɑ̃.sɛ\

Canadien français \ka.na.djɛ̃ fʁɑ̃.sɛ\ masculin (pour une femme, on dit : Canadienne française)

  1. Francophone du Canada.
    • O’Molloy, lissant sa barbe blonde, et gardant tristes ses yeux gris bleu de Celte, raconta des histoires de son jeune temps, alors qu’il travaillait à Boston. Il gardait le souvenir des bagarres entre Irlandais et Canadiens-Français, les soirs de paye, à la sortie des bars. — (Maurice Constantin-Weyer, Un homme se penche sur son passé, 1928, réédition Nelson, pages 39–40)
    • « Le projet de la Révolution tranquille, c’est de sortir les Canadiens français du Québec de leur sous-développement et de leur situation d’infériorité », explique Paul-André Linteau, professeur au département d’histoire de l’UQAM et auteur de l’Histoire du Québec contemporain. — (Le Devoir, 29-30 octobre 2005)
    • Si les années 1960 et 1970 furent en effet effervescentes, il n’en demeure pas moins que la Révolution tranquille consista grandement en un rattrapage du retard accumulé sous l’emprise d’une Église catholique conservatrice, qui définissait grandement le futur des Canadiens français comme la conservation d’un héritage, comme une simple survivance. — (Le Devoir, 11 septembre 2006)
    • À l’heure où pénètrent Canadien français et Canayen dans l’usage, le premier chez l’élite, l’autre chez le peuple, des intellectuels s’opposent au principe d’adopter des dénominations qui se substitueraient à Canadien, concession injuste à leurs yeux. Ils vont défendre l’idée qu’il faut s’accrocher au nom Canadien, appartenant historiquement en propre aux francophones : « Nos aïeux […] étaient purement et simplement des Canadiens. Canadien-français est un pléonasme : qui dit canadien dit français. […] Nous étions déjà des Canadiens sous le régime français, nous sommes restés canadiens après la cession, et c’est pour conserver ce titre de Canadien que nos aïeux ont lutté contre les conquérants » (La Presse, 9 avril 1892). — (Geneviève Joncas, « Virage à 180 degrés : Des Canadiens devenus Québécois », dans Cap-aux-Diamants, no 96, 2009, page 25–28 [texte intégral])
    • Elle conte l’histoire d’une famille victime de la Dépression puis des difficultés d’un Canadien français à une certaine époque : le chômage, la double aliénation linguistique et politique, la misère endémique. — (Nuit blanche, no 150, printemps 2018, page 39)
    • Speak White : c’est ce qu’on disait autrefois aux Canadiens français, ces bénéficiaires mondialement reconnus du privilège blanc et du racisme systémique. — (Mathieu Bock-Côté, Speak White, 2020, Le Journal de Montréal, 18 novembre 2020)

Notes[modifier le wikicode]

  • Le terme Canadien français a surtout été utilisé jusqu’à la fin des années 1960. À partir de ce moment, avec l’ascension du sentiment d’identité québécoise, il a été associé à une époque révolue ou à un fédéralisme de mauvais aloi, pour être marginalisé au profit du mot Québécois.
  • Le Québécois s’est voulu en rupture avec le Canadien français, incarnation de la soumission et de l’impuissance associées à l’imaginaire de la Survivance. — (Gérard Bouchard, Les nations savent-elles encore rêver?, Boréal, 2019, p. 273)
De cette mutation ont résulté :
  1. La disparition d’un mot qui désignait à la fois les Canadiens français du Québec et les Canadiens français hors Québec[2] (ces derniers étant actuellement au nombre d’environ un million).
  2. La disparition de la distinction entre les Canadiens français « de souche », en tant qu’ethnie, et les Québécois de plus en plus nombreux qui ne sont pas d’ascendance française (issus d’une immigration de plus en plus importante depuis les années 1970).
C’est ainsi qu’aujourd’hui, le terme Canadien anglais est plus courant que le terme Canadien français, malgré ce que pourrait laisser croire le parallélisme des deux formes.
  • Le terme Canadien français a connu son apogée du milieu du XIXe siècle au milieu du XXe siècle. Il ne s’opposait alors non pas à Canadien anglais mais à Anglais, comme en fait foi notamment un article signé par Marie-Victorin dans Le Devoir du 31 mai 1932, où l’auteur compare le nombre de bourses accordées par le gouvernement fédéral aux « Canadiens français » d’une part et aux « Anglais » d’autre part[3]. Le mot Canadien anglais est de confection plus récente dans le Canada français, et paradoxalement, il apparaît au moment où Canadien français s’efface au profit de Québécois.
  • Le mot « Canadien » tout court a longtemps désigné exclusivement les Canadiens français, pendant le Régime français évidemment mais aussi jusqu’au milieu du XXe siècle. Pendant un siècle, les mots « Canadien » et Canadien français sont utilisés à peu près indifféremment, les deux s’opposant alors à « Anglais » au sens de « Canadien anglais ». → voir Canadien
  • Du côté du Canada anglais, le mot Canadians tout court désignait au contraire les Canadiens anglais, les Canadiens français étant alors qualifiés (French Canadians) : « Au début du XIXe siècle, […] la notion de Canada français n’existait pas. Deux facteurs clés ont toutefois contribué à son invention : les effets d’une forte immigration en provenance des îles britanniques et l’union politique du Bas-Canada et du Haut-Canada. Devenus majoritaires et maîtres incontestés du jeu politique […], les Britanniques du Canada-Uni ont commencé à employer le nom Canadians pour se nommer eux-mêmes, accolant du même coup à leurs voisins celui de French Canadians pour bien s’en distinguer. Il faut le souligner : s’il y avait un French Canada et des French Canadians, il n’y avait pas d’English Canada, ni d’English Canadians. Si les Canadiens anglais existent aujourd’hui, c’est parce que les nationalistes québécois les ont inventés[4]. »
  • En Acadie, au milieu des années 1960, une certaine mouvance dominante s’opposant à la vision traditionnaliste de l’Acadie et des Acadiens a rejeté le mot Acadien pour le remplacer par Canadien français, vocable considéré comme plus ouvert. Toutefois, cette tendance n’a duré que quelques années[5].

Variantes orthographiques[modifier le wikicode]

  • Il peut paraître impossible qu’en dépit des traits accentués de son caractère et des tendances conservatrices qui le rendent réfractère [sic : réfractaire] à l’assimilation, le Canadien-français se soit adapté au rouage des institutions britanniques. — (Henri Bourassa, Les Canadiens-français et l’Empire britannique, S. A. Demers, 1903, page 9)
  • On sait comment, pour les Canadiens-français qui apprennent l’anglais, les inversions phonématiques des lettres g et j restent très longtemps en ambiguïté devant l’esprit. — (Henri Bélanger, Place à l’homme, Hurtubise HMH, Montréal, 1972)
  • Comme tous ses contemporains, il appelle Canadiens ses compatriotes de souche française, quoique parfois, après 1845, il écrive Canadien-Français ou Canadien français. Il conserve le terme Anglais pour nommer ses compatriotes de souche britannique et pour désigner les habitants du Royaume-Uni. — (Patrice Groulx, François-Xavier Garneau – Poète, historien et patriote, Montréal, Boréal, 2020, p. 17)

Apparentés étymologiques[modifier le wikicode]

Quasi-synonymes[modifier le wikicode]

Vocabulaire apparenté par le sens[modifier le wikicode]

Hyponymes[modifier le wikicode]

Traductions[modifier le wikicode]

Prononciation[modifier le wikicode]

Références[modifier le wikicode]

  1. Éric Bédard, Les Réformistes – Une génération canadienne-française au milieu du xixe siècle, page 72.
  2. Le passage de l’ethnonyme « Canadien français » à l’ethnonyme « Québécois » s’est accompagné d’une redéfinition spatiale de la nation, désormais délimitée par ce qui avait été jusque-là la province de Québec et qui devint l’État du Québec. […] La rupture entre les francophones québécois et les Canadiens français hors Québec fut consommée lors des trois assises des États généraux du Canada français tenus à Montréal entre 1966 et 1969. Cela dit, cette rupture, comme toutes les autres, s’est accompagnée de certaines continuités […]. — (Gérard Bouchard, Les nations savent-elles encore rêver ?, Boréal, 2019, page 271)
  3. R.F. Marie-Victorin, « Dans le maelström universitaire », Le Devoir, 31 mai 1932, page 2 en ligne ici : http://numerique.banq.qc.ca/patrimoine/details/52327/2791622.
  4. La trahison québécoise, un mythe canadien-français, http://tagueule.ca/2012/03/10/la-trahison-quebecoise-un-mythe-canadien-francais
  5. Joel Belliveau, émission Aujourd'hui l'histoire, Radio-Canada, 20 octobre 2016.
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