ébionite

Définition, traduction, prononciation, anagramme et synonyme sur le dictionnaire libre Wiktionnaire.

Français[modifier le wikicode]

Étymologie[modifier le wikicode]

  • Peut-être de Ébion, hérésiarque qui aurait vécu vers l’an 70 de l’ère chrétienne. Avec le suffixe : -ite (3).
  • Selon Renan, Vie de Jésus, livre I, chapitre 11, le mot viendrait de l’hébreu אביונים, evyonim — aujourd'hui plutôt transcrit : ’ebyônim — (« pauvre, saint, ami de Dieu »).
  • En fait ’ebyônim est le pluriel de l'hébreu אֶבְיוֹן, ’ebyon (« pauvre »), et signifie donc « les pauvres ». ’Ebyon vient lui-même probablement du copte « ⲉⲃⲓⲏⲛ » (transcrit en alphabet latin : EBIHN, prononcé ebiēn, « pauvre, nécessiteux »). Le pluriel hébreu ’Ebyônim a donné le grec ancien Ἐβιωναῖοι (Ebiōnaîoi) qui a donné le latin Ebionitae (« les Ébionites », soit « les Pauvres »).
Note : Pourquoi cette secte aurait-elle reçu (ou choisi) cette dénomination de « Pauvres » ? Peut-être, selon l'historien des religions Simon Claude Mimouni, en raison de leur vœu de détachement et de pauvreté, et de leur habitude d'un partage communautaire strict, « suivant ainsi le conseil donné par Jésus en Matthieu 10,9 »[1] ; pour lui, ’Ebyon « n'est pas le nom du fondateur du mouvement », mais plutôt une sorte d'appellation descriptive revendiquée (peut-être par retournement du stigmate), ou une « raison sociale hérésiologique »[2].

Nom commun [modifier le wikicode]

Singulier Pluriel
ébionite ébionites
\e.bjɔ.nit\

ébionite \e.bjɔ.nit\ masculin

  1. (Christianisme) Personne appartenant à une secte judéochrétienne assez mal connue et relativement marginale, attestée dès le IIe siècle ; cette secte se serait développée au tout début du christianisme, à partir de Jérusalem, du Ier au IVe siècles dans les régions de Judée, de Palestine et alentour (et peut-être plus tard en Arabie). Elle regroupait des hérétiques adeptes d'une christologie de type « adoptianiste », qui croyaient que le Christ était simplement un homme né naturellement de Joseph et de Marie, puis « adopté » par Yahweh (Dieu) à son baptême, et qui, en raison de son observance parfaite de la Torah, a été choisi par Dieu pour être le dernier prophète annonçant Son Royaume. Pour les ébionites, l’observation stricte de la Loi de Moïse était obligatoire comme pour tous les juifs.
    • Il faut renoncer à en faire, comme Tischendorf le voulait, un ébionite, fût-ce un ébionite orthodoxe. — (Émile Amann, Le Protévangile de Jacques et ses remaniements latins, 1910)
    • De plus, comme tous les hétérodoxes judéochrétiens, ils [les ébionites] se caractérisent par un antipaulinisme* affirmé et virulent [*opposition aux doctrines de Paul de Tarse, notamment sur l'ouverture du christianisme aux non juifs]. — (Simon Claude Mimouni, Les chrétiens d'origine juive dans l'antiquité, Ed. Albin Michel, 2004, ISBN 2-226-15441-8, page 162.)
    • Pour J.M. Magnin, les membres de la première communauté hiérosolymitaine [ou Église de Jérusalem], que leurs compatriotes juifs appelaient nazaréens, ont très bien pu se donner à eux-mêmes le nom d'ébionites — c'est-à-dire « les pauvres ». [...] Nulle part, toutefois, il n'est rapporté de manière claire dans les sources que les nazôréens se sont donné le nom d’ébionites. — (Simon Claude Mimouni, Les chrétiens d'origine juive dans l'antiquité, Ed. Albin Michel, 2004, ISBN 2-226-15441-8, page 163.)
    • Si l'on veut atteindre sous leur forme la plus primitive les traits communs à l'essénisme et au christianisme, c'est chez les Ébionites qu'on doit de préférence les rechercher du côté chrétien. — (Simon Claude Mimouni, Les chrétiens d'origine juive dans l'antiquité, Ed. Albin Michel, 2004, ISBN 2-226-15441-8, page 189.)

Notes[modifier le wikicode]

N.B. : du fait de la rareté ou de l'inexistence des sources directes, de leur ambiguïté et de leurs interprétations parfois contradictoires, les frontières tant historiques, géographiques, doctrinales, existentielles que lexicales et onomastiques entre les premières sectes judéochrétiennes ne sont pas connues avec exactitude, et ne font pas consensus parmi les historiens des religions. Ces sectes sont généralement connues de manière indirecte (et le plus souvent dans une perspective critique ou polémique) dans la première littérature patristique et hérésiologique du Ier au Ve siècle.
Ainsi pour certains chercheurs, « ébionites » et « nazoréens » constituaient une seule et même communauté judéochrétienne sous deux noms différents et se confondaient avec la première église des disciples de Jésus de Nazareth à Jérusalem.
Pour d'autres, il s'agit de deux sectes bien distinctes : les nazoréens sont alors considérés comme « orthodoxes » par les hérésiologues chrétiens anciens parce qu'ils reconnaissent à la fois la messianité et la divinité de Jésus tout en pratiquant intégralement la Loi juive ; alors que les ébionites sont jugés hétérodoxes, parce qu'ils voient en Jésus le Messie attendu mais refusent de reconnaître sa divinité[3].
Ainsi dans les sources il peut y avoir confusion (involontaire) ou assimilation (volontaire) entre les diverses dénominations des sectes judéochrétiennes du christianisme antique : nazoréens, ébionites, cérinthiens, sabéens, elcésaïtes (ou elkasaïtes), sampséens, osséens (plus ou moins proches des Esséniens) etc..

Enfin, certains historiens des religions dégagent certaines parentés existentielles et doctrinales d'une part entre les ébionites et leurs prédécesseurs juifs du mouvement essénien, et d'autre part situent dans l'ébionisme l'une des origines de l'islam, notamment en ce qui concerne l'élaboration de la vision islamique de la figure de ʿĪsā/Jésus dans le Coran. Ceci en raison du fait attesté de la présence vraisemblable de sectes judéochrétiennes dans la péninsule arabique au moins jusqu'au XIIe siècle, et assurément au VIIe siècle à l'époque de Mahomet. [Voir, sur ce sujet de l'ébionisme comme une sorte de trait d'union entre judaïsme, christianisme primitif et islam, la section « Rapports entre ébionisme, essénisme et islam » ainsi que la section « Dans la péninsule arabe » de l’article traitant de l’Ébionisme sur l’encyclopédie Wikipédia . Voir aussi la section « Christologie musulmane » dans l'article Christologie non chrétienne sur l’encyclopédie Wikipédia ].

Dérivés[modifier le wikicode]

Schéma très simplifié des principales divergences christologiques concernant la nature humaine et/ou divine de Jésus, et noms des courants ou hérésies associés ; d'après Mircéa Eliade[4]. La plupart des églises chrétiennes modernes (dont l'Église catholique romaine, l'Église orthodoxe et presque toutes les Églises protestantes) sont dites « Chalcédoniennes » : c.-à-d. qu'elles acceptent la définition donnée au concile de Chalcédoine (451) concernant la double nature divine et humaine de Jésus-Christ, natures à la fois distinctes et reliées en Lui seul (diophysisme)[5].

Traductions[modifier le wikicode]

Adjectif [modifier le wikicode]

Singulier Pluriel
ébionite ébionites
\e.bjɔ.nit\

ébionite masculin et féminin identiques

  1. (Christianisme) Relatif à l'ébionisme.

Prononciation[modifier le wikicode]

Paronymes[modifier le wikicode]

Voir aussi[modifier le wikicode]

Références[modifier le wikicode]

  1. Simon Claude Mimouni, Les chrétiens d'origine juive dans l'antiquité, Éd. Albin Michel, 2004, ISBN 2-226-15441-8, page 174.
  2. Simon Claude Mimouni, Les chrétiens d'origine juive dans l'antiquité, Éd. Albin Michel, 2004, ISBN 2-226-15441-8, page 173.
  3. Simon Claude Mimouni, Les chrétiens d'origine juive dans l'antiquité, Ed. Albin Michel, 2004, ISBN 2-226-15441-8, page 149-150.
  4. Mircea Eliade, Dictionnaire des religions, Pocket, collection « Agora », Paris, 1994, ISBN 2-266-05012-5, page 129.
  5. Voir aussi le schéma arborescent de l'évolution des premières branches du christianisme à la fin de l'article de : François Blanchetière, « Reconstruire les origines chrétiennes : le courant “nazaréen” », dans Bulletin du Centre de recherche français à Jérusalem no 18, 2007, pages 43-58 [texte intégral].